Après la pause générale du mois d’août, les salariés reviennent en forme. La rentrée est une excellente occasion pour un(e) responsable d’utiliser leur énergie positive pour qu’ils produisent un engagement durable et de qualité.

 

Un moment neuf

La rentrée est un moment suspendu. Un fil tendu entre deux mondes. Le corps est revenu au travail ; on a encore la tête et le cœur en vacances. C’est un moment neuf. On a presque oublié les conflits sur les budgets de juin dernier. C’est une autre atmosphère. On s’échange des expériences nouvelles vécues dans d’autres espaces. Attention ! Chacun va montrer une vraie disponibilité et une grande capacité d’attention pendant quelques jours seulement.

Cette situation peut être une belle fenêtre d’opportunité. Si on pense qu’il faut « siffler la fin de la récré », on risque de faire croire que le travail est une punition et qu’il n’y aura que souffrance jusqu’à Noël. Cela donnera-t-il envie d’avancer ? Les managers ont plutôt intérêt à surfer dans le sillage de l’énergie favorable des vacances. C’est ainsi qu’ils produiront un contexte d’engagement pour leurs équipes, facteur d’initiative, de créativité et d’adaptation. Or dans les entreprises d’aujourd’hui en contact direct avec des clients volatiles, c’est de plus en plus la clé pour la production de valeur.

Concrètement est-ce si simple ? Non. Car le métier de manager n’est pas facile. Il requiert de fortes compétences relationnelles. Celles-ci vont bien au-delà de l’excellence dans l’expertise technique ou dans la capacité à faire un reporting détaillé. La bonne nouvelle c’est que ces compétences peuvent largement s’apprendre. En septembre, trois stratégies sont en particulier mises en œuvre par les managers qui ont intégré l’aspect humain de leur métier.

Vision en septembre, engagement jusqu’en décembre

D’abord, le flottement de la rentrée est un moment privilégié pour réaffirmer la vision. Celle-ci donne un sens et une cohérence à l’action collective et individuelle. On ne peut pas arriver quelque part si on ne sait pas où l’on va. Une entreprise dans le domaine de la santé a prévu par exemple d’organiser une réunion de son comité des opérations. Chaque responsable régional participe à la remise à jour d’une projection commune : « qui sommes-nous fondamentalement, qu’apportons-nous de spécifique à nos clients, quel mode d’engagement des ressources humaines utilisons-nous, où nous situerons-nous dans cinq ans ? » A un niveau plus individuel, c’est aussi le moment de confirmer un cap à un salarié. Un directeur technique qui passe au comité de direction se voit par exemple rappeler par son dirigeant la nécessité de passer de la posture de manager à celle de leader. Un coaching lui est proposé pour l’aider. Dans ces deux cas, on montre le chemin à un moment où les personnes ne sont pas encore le nez dans le guidon et cela les aide à avoir envie de le parcourir.

Soigner les débuts au moins autant que les fins

Ensuite, la direction étant fixée, il est bienvenu de faire ressentir l’appartenance à un groupe. Seul, on va plus vite, ensemble, on va plus loin. Faire partie d’un collectif plus grand que soi, auquel on apporte sa contribution, est un moteur pour beaucoup de salariés. Les managers peuvent tirer parti des retrouvailles de la rentrée pour réaffirmer la place de chacun et son importance dans l’œuvre collective. Ce que l’on appelle les techniques d’inclusion sont multiples. Les responsables qui prennent des nouvelles de chacun, montrent une attention sincère, accueillent chaque membre de l’équipe lors de son retour de congé ne perdent pas leur temps : ils l’investissent pour construire des capacités de coopération (et par la même occasion, s’ils aiment les gens, ils se font plaisir). Dans une entreprise du domaine bancaire, un département organise des déjeuners où chacun vient présenter à tous son activité. Ce sont des occasions de mieux se connaître, se comprendre, s’accepter. Vous avez remarqué qu’on organise souvent des repas de fin d’année ? Les repas de rentrée, c’est plus rare. Ils sont pourtant beaucoup plus productifs. A un moment où on revient au travail, être rassuré chaleureusement sur sa place produit des émotions positives qui ont toute la force des premières impressions : elles durent longtemps !

La rentrée pour tous.

Enfin, il y a une vie en dehors du travail. Elle a une dimension à la fois affective et pratique. La rentrée, c’est aussi celle des élèves. Et elle n’est pas toujours facile à organiser pour les parents. De nombreuses conventions collectives prévoient pour les salariés des autorisations d’absence de deux heures à une journée en fonction de l’âge et de la classe de leurs enfants. Les managers peuvent aussi d’eux-mêmes faciliter la vie de leurs équipes. Dans une entreprise du domaine de l’édition, une responsable a pris l’habitude d’offrir (sans les décompter) des journées de congé à tous les parents de son département. Elle s’est ensuite rendue compte que le taux d’absence annuel était plus faible chez elle que dans les autres départements.

Le travail dans le plaisir

Les prochaines vacances des salariés, ce sera fin décembre. Leurs managers ont un rôle délicat pendant la période charnière de septembre : produire un contexte qui va leur donner envie de s’engager pour (au moins) quatre mois. L’énergie accumulée pendant les vacances est disponible pour être investie au travail. Avant que chacun ne se mette en vitesse de croisière et reprenne ses habitudes, les managers peuvent organiser le transfert de cette énergie en remettant à jour la vision, en réaffirmant l’inclusion et en facilitant l’organisation pratique des parents lors de la rentrée des classes. Cela peut aider à ce que les salariés marient aussi bien le plaisir et le travail qu’ils viennent de le faire pour le plaisir et les vacances. A cet égard, quelques études ont justement montré que l’on peut se sentir même plus épanoui (plus dans le flux) lorsque l’on mène des projets professionnels que lorsque l’on prend des vacances [1].

[1] Csikszentmihalyi, M. (1992). Flow: The psychology of happiness. London: Rider.

Thierry Nadisic, emlyon business school

Thierry Nadisic

Docteur en comportement organisationnel, je suis également agrégé en économie et gestion. Manager expérimenté, je suis coach certifié et formateur en leadership et management des équipes, conduite du changement et engagement des salariés. Mes recherches ont pour thèmes principaux le sentiment du juste, les émotions et le bien-être au travail. Je suis depuis 2015 le conseiller scientifique du magazine « Psychologie Positive ». J’écris régulièrement des chroniques sur le management contemporain.

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