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Leadership & Management

Équipes performantes : les effets positifs de la confiance partagée

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Nous savons depuis longtemps que la confiance joue un rôle clé dans la performance des équipes. De nombreux travaux l’ont mis en évidence ces dernières années. La confiance facilite la communication dans les relations en favorisant l’ouverture, la familiarité et la fiabilité, qui impactent à leur tour la performance de l’équipe. Mais cette notion de confiance reste essentiellement comprise (au niveau des recherches scientifiques) et abordée (au niveau des pratiques d’entreprises) comme une relation ente deux individus, ou entre un individu et un groupe.

Or, en analysant uniquement les effets de variables du type « j’ai confiance en mon manager » ou « j’ai confiance en mes coéquipiers », les études classiques ne capturent pas le degré de convergence des perceptions de confiance ni son effet potentiel sur la performance. En d’autres termes, nous savons si les membres de l’équipe ont confiance en leur manager ou leur équipe au sens large, mais nous savons rarement si les membres de l’équipe ont tous confiance les uns envers les autres.

En effet, la confiance est une notion plus complexe qu’il n’y parait et la question de « confiance partagée » au sein d’une équipe joue un rôle clé. Concept récent dans la littérature académique, cette confiance partagée est depuis longtemps au cœur des pratiques des équipes hautement performantes, notamment celles opérant dans des organisations à haute fiabilité (par exemple, chez les pompiers).

Le fait qu’une équipe converge dans ses perceptions de confiance joue aussi un rôle majeur pour construire des collectifs solidaires et performants dans des organisations plus traditionnelles. C’est ce que nous enseigne l’étude que nous avons menée (à paraître), en collaboration avec la plate-forme d’aide au management Open Decide, auprès de plus de 1 400 collaborateurs et 120 équipes au cours des trois dernières années.

A-t-on confiance les uns envers les autres ?

Faire converger les perceptions de confiance réduit l’incertitude relationnelle en permettant aux membres de l’équipe de mieux estimer et anticiper les réactions des autres. Différents types de « combinaisons de confiance » sont possibles dans les équipes.

Dans certaines équipes, il y aura convergence des perceptions de confiance, c’est-à-dire que tous les membres de l’équipe seront exactement à quoi s’en tenir en termes de confiance au sein de leur collectif. La convergence pourra s’opérer à un niveau de faible confiance : les membres de l’équipe se font peu confiance mais, en ayant réduit l’incertitude relationnelle, peuvent mieux prédire les comportements des autres et, in fine, adapter leurs attentes et comportements au juste niveau.

Chez d’autres, comme les équipes des forces spéciales françaises que nous avons pu étudier dans une autre recherche, la convergence pourra s’établir à un haut niveau de confiance permettant au collectif de bénéficier d’une acceptation de vulnérabilité et d’un engagement total et de chacun de ses membres.

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Confiance partagée. Adobe Stock

 

À l’inverse, dans d’autres équipes, les perceptions de confiance peuvent diverger. Si la confiance d’un membre envers ses coéquipiers est supérieure à la confiance qu’ils ont envers lui, il court le risque de voir ses attentes déçues ou de se rendre vulnérable à une partie qui in fine exploitera cette vulnérabilité. Dans ce cas-là, il réagira négativement sur un plan émotionnel et aura tendance à diminuer son engagement au sein de l’équipe.

Dans le cas contraire, si la confiance d’un individu dans l’équipe est plus basse, il risque de décevoir les attentes de ses coéquipiers et ne bénéficiera sans doute pas d’autant d’aide que ce qu’il pourrait en attendre. Et si aucun processus collectif ne vient faire converger les perceptions, la divergence peut perdurer et affecter négativement la performance.

Résoudre le dilemme social fondamental

Nos travaux de recherche donnent à voir que, lorsque cette confiance dans l’équipe est partagée, cela a aussi des impacts positifs sur la volonté de s’entraider. Cet effet positif existe au-delà des seuls effets de la confiance individuelle plus classiquement considérée.

La volonté de s’entraider constitue une dimension de ce que les scientifiques appellent « les comportements citoyens ». Ces comportements sont discrétionnaires, variables selon les personnes, pas forcément reconnus au sein de l’organisation, quand bien même ils favorisent le fonctionnement des collectifs. Volontaires, ils vont au-delà de ce qui est attendu dans la fiche de poste. C’est par exemple se rendre disponible pour un membre de l’équipe qui fait face à un problème, qu’il soit professionnel ou non.

Les études montrent que ces comportements citoyens favorisent la performance des groupes, tout particulièrement lorsque les individus sont interdépendants dans la réalisation de leurs tâches.

Encourager le partage de la confiance

Comment les managers peuvent-ils encourager ce partage de confiance dans leurs équipes ? Nouvelle dimension de leur leadership, ces derniers doivent mettre en place des process qui permettent à leurs collaborateurs d’éprouver leur confiance réciproque et de tester progressivement l’ouverture et l’acceptation de leur vulnérabilité.

À l’instar des pratiques en place dans les équipes opérant en contexte de haute fiabilité, les managers doivent mettre en place des processus de feedback collectifs réguliers, s’assurer de l’explicitation claire des règles collectives à l’œuvre et garantir la transparence de la communication au sein de l’équipe.

Loin d’être évidents à mettre en œuvre, ces processus réclament des temps dédiés (à faire rentrer dans des agendas très chargés), de la compétence d’accompagnement d’échanges entre les pairs (de type co-développement) et une efficacité de communication dans le rappel des règles et des rôles de chacun de la part du manager.

Enfin, encourager les activités de socialisation formelles et informelles permettent aux membres de l’équipe de parfaire leur connaissance mutuelle et de se découvrir dans un contexte sans attente de performance, plus propice à l’expression « vraie » de soi.

 

Emilia Keegan, directrice scientifique chez Open Decide, a contribué à la rédaction de cet article.

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.